Sören avait toujours connu que la cité d’Ys. Il se rappelait vaguement avoir quitté le pays une ou deux fois durant son enfance – ça ressemblait vaguement à des retrouvailles familiales – à une période où les souvenirs ne lui venaient que rarement. Il ne voyait pas très souvent ses parents, tous les deux médecins, et parlait plus avec eux via son téléphone qu’en face à face, privilégiant leur travail à leur vie de famille. Pas que ça lui déplaisait, ou s’était-il juste simplement habitué à la solitude.

Il détestait rester assis entre les murs blancs sans vie, l’odeur de désinfectant dans l’air et tapissés de tableaux alors on le voyait souvent dehors après les cours, à jouer avec ses camarades de classe ou à faire la course sur son vélo. Parfois, il montait juste dessus pour parcourir la ville, et se sentir vivre en enviant presque ces couples avec enfants qu’il croisait dans la rue. Enviant sans le désirer, parce qu’il savait intérieurement qu’il n’allait pas supporter toute l’attention après toutes ses années d’éducation et de « je t’aime » à distance. Sa vie était sans histoire, avec la même routine, le même appartement silencieux, les mêmes promesses, les mêmes appels et messages. Sans histoire et beaucoup trop fade.


Sören est né et a été élevé dans la cité. C’est sa maison, et il n’a pas vraiment d’avis là-dessus. Il la considérait comme une ville sans aller jusqu’à l’utopie comme il l’entendait dans la rue. Il y a ses habitudes et il y connaît presque tous les recoins, rien de bien exceptionnel, même si par moment il a l’impression que rien n’y est réel à part les constructions ou est-ce son pessimisme qui le fait penser comme ça, ne s’ouvrant alors que rarement aux personnes qui l’entourent et leur donnant des réponses préfabriqués dans le but de clore la conversation.


Au départ, il ne le réalisa pas tout de suite. Il se réveilla dans un appartement silencieux comme d’habitude, son téléphone clignotant avec des messages de ses parents datant de la veille lui répétant de ne pas oublier de manger. Il se lève, sans percuter que l’extérieur était trop silencieux pour l’heure donné. C’est en terminant son bol de céréales et en retrouvant tous ses sens qu’il réalisa enfin le problème. Le silence, l’absence de bruit chez ses voisins, les voitures qui ne circulaient pas. Il gagna son balcon et cligna des yeux. « Ah, c’est la fin du monde ? »